N° 1663 1 mars 2015

À PROPOS DU JEÛNE ET DE L’ABSTINENCE

2202

Dans les Notes tirées du sermon de la semaine dernière, j’ai évoqué les « deux jours de jeûne et d’abstinence (le mercredi des Cendres et le vendredi Saint) » auxquels nous oblige notre sainte Mère l’Église en nos temps de décadence. J’en ai dit quelque chose également sur mon site cassicia.com et la réaction que j’avais peu après prévue — mais non recherchée — est arrivée. Entre autres : « Monsieur l’Abbé. Le Carême comporte 40 jours. Sur quelle autorité vous basez-vous pour affirmer qu’il n’y aurait plus que 2 jours de jeûne et abstinence ?! ». La question en effet se pose depuis de nombreuses années puisqu’il ne peut s’agir ici que de l’Autorité de l’Église. La réponse formelle est de toute simplicité : c’est l’Autorité en acte, si elle existe, ou la dernière en date avant son éclipse. Bien sûr, la difficulté est déplacée. Mais c’est précisément ce qui fait l’embarras au quotidien : la crise de l’autorité qui laisse ainsi le troupeau s’égailler (et sûrement pas s’égayer, sauf pour quelques-uns qui en abusent…), est un drame pour tous, simplement parce que « Ô épée à deux tranchants, réveille-toi ; (…) frappe le pasteur, et les brebis seront dispersées » (Zach., XIII, 7). Je renvoie donc à l’analyse sereine mais doctrinale de l’Autorité dans l’Église (ce à quoi quelques prêtres ont sérieusement travaillé depuis vaticandeux).

Quant au jeûne et à l’abstinence, on sait que Notre Seigneur Jésus-Christ, qui a jeûné pendant quarante jours et quarante nuits avant d’entrer dans Sa vie publique, n’a laissé à l’Église aucune prescription pour le jeûne, d’où la constatation à travers les siècles des plus grandes divergences dans sa pratique. Évidemment, le jeûne est recommandé mais d’une façon large : saint Paul recommande de façon générale la mortification de la chair, comme opposée aux vices des païens. Quant à Jésus, Il recommande à Ses disciples de ne pas jeûner avec ostentation comme les Pharisiens. L’Église dès ses débuts a donné des prescriptions comme le jeûne du mercredi et du vendredi (dans la Didaché fin du Ier siècle) ne suivant pas les coutumes juives. Certes, dans ces tout premiers siècles, le jeûne revêtait un caractère strict de la part de ceux qui voulaient vraiment se sanctifier, et encore plus rigoureux de la part d’hérétiques comme les eusthatiens, qui interprétaient strictement les termes : jeûner par définition c’est ne rien manger ni boire du tout. C’est parmi les solitaires du désert que l’on trouve les pratiques de jeûne les plus extraordinaires. Mais en même temps, on en signalait les abus et les règles les plus sages furent données par les maîtres de la vie spirituelle pour fixer au jeûne son véritable caractère et sa portée pour la sanctification. Ainsi, les pratiques se modifièrent dans la suite des siècles : un repas unique le soir, puis seulement à midi, puis en plus une collation le soir… Puis le jeûne a été interdit certains jours considérés de joie (comme le dimanche, le Temps pascal…). Le jeudi fut même interdit comme jour de jeûne à cause des païens consacrant ce jour à Jupiter.

Remarquons qu’en Occident l’usage de ne rompre le jeûne que le soir (ad vesperam) était très répandu, et par la suite, la servile copie par l’islam, là aussi, est demeurée jusqu’à nos jours dans son ramadan avec le fait de cracher pour ne pas avaler la salive.

EN CE QUI CONCERNE LE CARÊME

Le jeûne proprement quadragésimal n’apparaît qu’au IVe siècle. Et en Provence, un sermon de celui qui fut d’abord Abbé de Lérins, saint Fauste de Riez (ville épiscopale, près de Moriez, datant du premier ou deuxième siècle, évêché supprimé en 1801), nous apprend que dans son diocèse on ne jeûnait que cinq jours par semaine et que ce Saint eut voulu introduire une semaine supplémentaire de jeûne (pour atteindre les trente-six jours de l’Église romaine). Bientôt, l’usage romain prévaudra dans toute la Gaule. Au début du VIIe siècle cet usage sera de règle dans tout l’Occident.

Le jeûne est d’ordinaire associé à l’abstinence (chair des animaux, vin et autres boissons alcooliques). On retiendra aussi que le jeûne des Quatre-Temps, d’institution romaine ne s’est généralisé à l’Occident que plus tard et que l’Orient l’ignore. C’est le Pape saint Grégoire VII qui rendit définitive la constitution des Quatre-Temps : service liturgique, jeûne le mercredi, le vendredi et le samedi de la première semaine de Carême, (et ainsi pour les autres saisons) ce qui laisse les autres jours nettement libres…

POUR CONCLURE

Sur quelle autorité me fondé-je ? Le Code de Droit Canon en vigueur (promulgué en 1917) prescrivait comme jeûne et abstinence en Carême : le mercredi des Cendres, les vendredis et samedis, les jours des Quatre-Temps (canon 1252 § 2). Pie XII, le 28 janvier 1949 par la Sacrée Congrégation du Concile indique que « Dorénavant, les quatre jours [de l’année] où doit être observé le précepte du jeûne et de l’abstinence, seront les suivants : durant le Carême, le Mercredi des Cendres et le Vendredi Saint ; (…) ».

Le Carême ne se réduit d’ailleurs pas au jeûne et à l’abstinence : en font partie toutes les autres pratiques ascétiques et toutes les mortifications, la solitude, le silence, l’aumône, les bonnes œuvres et les prières. Saint Carême !

  • (Consulter : Vacant, DTC - Dictionnaire de Théologie Catholique ; Dom Cabrol et Dom Leclerc, DACL - Dictionnaire d’Archéologie Chrétienne et de Liturgie, Letouzey et Ané, Paris-1927 ; Naz, Dictionnaire de Droit Canonique, Letouzey et Ané, Paris-1937 ; et autres ouvrages classiques.)

LA PÉNITENCE DES STYLITES
L’église Saint-Siméon le Stylite à Jbeil (Byblos, Liban)

Photo Abbé JMS

Une des nombreuses chapelles construites par les Croisés.
Une des nombreuses chapelles construites par les Croisés.

2204

À l’Est de Byblos, sur une petite hauteur, on aperçoit une vieille petite chapelle. Au centre de cette chapelle, construite par les Croisés, se dresse un énorme tronc de colonne en marbre, d’un stylite qui vécut là, sur elle.

La chapelle carrée, édifiée par les Croisés et surmontée en plus d’une coupole épaulée par les bas-côtés, est destinée à mettre en valeur la colonne du stylite.

L’église Saint-Siméon le Stylite à Jbeil (Byblos, Liban)

L’intérieur (Photo Abbé JMS)

L
L'imposante colonne, rare spécimen actuel.
S. LUCIUS Ier

Saint Lucius eut la tête tranchée le 4 mars 253.
Saint Lucius eut la tête tranchée le 4 mars 253.

2206

Saint Lucius, prêtre romain, fut élu pour succéder à saint Corneille martyrisé sous Gallus. Exilé pour la Foi, il fut rappelé « avec le double honneur de confesseur et d’évêque ». Tellement que « il sembla avoir été proscrit non pas pour priver l’Église de son pasteur, mais seulement pour accroître son honneur et la joie des fidèles par son heureux retour » (S. Cyprien le félicitant).

C’est à saint Lucius que remonte le décret qui ordonne qu’au moins deux prêtres accompagnent toujours l’évêque en quelque lieu qu’il réside, afin « qu’il ait toujours des témoins de sa vie » (S. Damase).

CHRONIQUE ANONYME

2208

LA MORT. S’il vous arrive d’éprouver de la tristesse à cause de la certitude d’une mort inévitable, consolez-vous avec la promesse de l’immortalité future et l’espérance d’une heureuse résurrection. En effet, pour les Chrétiens fidèles, la vie n’est pas enlevée mais changée, car le Seigneur nous donnera au Ciel une demeure éternelle après que la maison de notre séjour terrestre se sera écroulée.

Pour nous aider à méditer

Hérode recherchait Notre-Seigneur pour le faire mourir, (…) craignant que Notre-Seigneur ne vint lui ôter sa royauté. (S. François de Sales, Entretiens, III)

Notes tirées du sermon

Quel spectacle unique sur notre terre que la Transfiguration de Notre Seigneur sur le Mont Thabor ! Et quoi de plus facile pour nous que de faire la « composition de lieu » pour notre méditation :

À l’écart, loin des hommes et de leurs agitations terre à terre.

Une haute montagne. Pourtant il ne s’agit que de ce que des alpinistes appelleraient dédaigneusement tout au plus un monticule : dans une plaine de Galilée, elle a moins de 600 m d’altitude, mais la vue y est impressionnante… « Le Thabor ressemble à un autel surélevé, que Dieu aurait construit en son propre honneur. De par sa forme particulière et sa situation, il semble déclamer de toute sa puissance un chant pétri de sensibilité. Tous ceux qui s’en approchent sont soudain envoûtés » écrivait un voyageur. C’est nous rappeler la distance qui existe entre le naturel et le surnaturel, car nous sommes impressionnés dans nos temps modernes par les exploits techniques qui nous coupent le souffle, et puis avec l’habitude, plus rien ne nous étonne, pas même les vrais miracles, ni la grandeur des choses simples.

Son visage resplendit comme le soleil, et Ses vêtements devinrent blancs comme la neige. Le tout sous le ciel lumineux de cette contrée méridionale.

Et puis les personnages : bien sûr Jésus Lui-même avec les trois disciples choisis : Pierre, Jacques et Jean. Et cette surprise : les deux représentants de l’Ancien Testament personnifiant la Loi (Moïse) et les Prophètes (Élie). Que dire de l’entretien qu’eurent ces deux Saints avec le Messie ? S’agissait-il du confort terrestre ? (Faisons trois tentes…). Puis nouvel ébahissement : une nuée lumineuse les couvrit ; avec ce couronnement d’une voix qui en sort, Celui-ci est Mon Fils bien-aimé, en qui J’ai mis toutes Mes complaisances ; écoutez-Le.

Cette transfiguration du Corps de Notre-Seigneur est bien un modèle pour nous. La pénitence du Carême peut obtenir notre sanctification à l’exemple des quarante jours de jeûne de Jésus, de Moïse et d’Élie, du moins notre amendement.

Recommandation spirituelle de la semaine

« Quærite Dominum, dum inveniri potest… Cherchez le Seigneur, tant que vous pouvez encore Le faire… » (Isaïe, LV, 6 et Répons bref à l’office de Prime en Carême).

Le Mont Thabor en Galilée.
Le Mont Thabor en Galilée.

Mardi 16 avril 2024
de la Férie
4e classe
Temps Pascal

S. Benoît-Joseph Labre,

confesseur


Ste Marie-Bernard

(Bernadette Soubirous),

vierge

Aux diocèses de Lourdes-et-Tarbes,

et de Nice :

la fête se célèbre le 18 février,

ancien jour octave de

Notre-Dame de Lourdes.


S. Paterne (ou S. Pair),

évêque d’Avranches et confesseur


À Vannes fête de S. Patern l’Ancien

(voir au 15 avril)


voir Le Martyrologe #90-4




Oraison - collecte
Ô Dieu, qui, par l’humilité de Votre Fils, avez relevé le monde abattu, accordez à Vos fidèles une allégresse constante, et faites jouir des joies éternelles ceux que Vous avez arrachés aux dangers d’une mort sans fin. Par le même Jésus-Christ Votre Fils, Notre Seigneur, qui vit et règne avec Vous dans l’unité du Saint-Esprit, Dieu dans tous les siècles des siècles.
Ainsi soit-il

Vie du Saint du jour
Après avoir vainement essayé de se faire à la vie des Chartreux et à celle des Trappistes, saint Benoît-Joseph Labre choisit, comme expression de la volonté de Dieu à son égard, la vocation de pèlerin.


Il parcourut en pauvre et en pèlerin de Dieu les grand-routes de nos pays, portant partout le témoignage de l’humilité la plus grande et de la plus totale abnégation. Il aimait surtout Rome, Lorette et Assise. Souvent, il fut regardé comme un fou, et fut le jouet des enfants et de la populace.


Il était né à Amettes, dans le diocèse d’Arras, et mourut à Rome le 16 avril 1783, à l’âge de trente-cinq ans.


 voir la grande vie du Saint


Résolution pratique du jour
Retenez ces belles paroles de saint Benoît-Joseph Labre dont c’est la fête aujourd’hui :

« Notre cœur doit être de feu pour Dieu,

« de chair pour le prochain,

« de bronze pour nous-mêmes ».


Méditation du jour
C’était il y a quatre ans…
SIC TRANSIT GLORIA MUNDI

Ainsi passe la gloire du monde

Terrible commencement de cette Semaine Sainte !

L’incendie de la cathédrale de Paris de la nuit dernière est un avertissement et un rappel…
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